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Duolimonis
22 novembre 2019

le Bon sauveur Picauville

 

 

« L’Asile des photographies » : dans les archives de l’hôpital psychiatrique
de Pont l'Abbé -Picauville 50
Bal masqu, hpital de Picauville (Manche). Sans date.
Bal masqué, hôpital de Picauville (Manche). Sans date. -
Photographe inconnu.   Archives Fondation Bon-Sauveur
photos datant de 1973 ou 1974 me semble t'il .

A la demande d’une institution médicale, la Fondation Bon-Sauveur,

l’historien Philippe Artières et le photographe Mathieu Pernot se sont

immergés dans les archives de l’hôpital psychiatrique de Picauville.

Dans de vieux bâtiments voués à la démolition, ils ont trouvé parmi

des centaines de documents contenus dans des cartons,

un fonds photographique important.

De ce travail de recherche, commencé en 2010, une exposition et

un livre sont nés sous le titre «  L’Asile des photographies  ».

L’exposition (co-produite avec «  La Maison Rouge  ») était  visible

au Centre d’art « Le Point du Jour » à Cherbourg. Le livre a reçu le prix Nadar 2013.

Dfil des alins le jour de la fte du Bon-Sauveur. Sans date.
Défilé des aliénés le jour de la fête du Bon-Sauveur. Sans date.
- Photographe inconnu. Archives Fondation Bon-Sauveur

Les auteurs aiment dire que cette recherche rencontre plutôt l’histoire

de la photographie que celle de la psychiatrie.

Il semblerait en effet que, des années 30 à récemment, tous les secteurs

de l’hôpital aient fait le sujet de prises de vues :

patients et personnel soignant, architecture, vie quotidienne et officielle

de l’hôpital. Tous les statuts et les applications de la photographie y sont

représentés : le portrait d’identité, le reportage, l’instantané, la carte postale,

l’anonyme et l’imagerie médicale. En tout, une collection.

Cette profusion de pratiques rejoint le roman de la photographie,

ses particularités et même ses particularismes, telle les photos faites

par et pour les religieuses, des carmélites héritières des fondatrices

de l’institution en 1837.

La communaut des religieuses du Bon-Sauveur de sortie. Photographe (l'une d'entre elles) inconnue. Sans date.
La communauté des religieuses du Bon-Sauveur de sortie. Photographe
(l’une d’entre elles) inconnue. Sans date.

Où sommes nous ? Qui sont ces gens ?

A l’ approche de toutes ces photographies, il est possible de ressentir

un « trouble » selon le mot de Philippe Artières.

Cet état peut provenir de plusieurs sources : l’anonymat général,

l’absence de repères chronologiques précis, les situations inhabituelles,

des scènes abstraites. Où sommes-nous  ?

Le jour de la fête de la sainte patronne du lieu est un grand moment

de détresse pour un regard cartésien.

Le défilé  : des hommes marchent en ligne. Qui sont-ils  ? Où vont-ils  ?

Dfil des alins le jour de la fte du Bon-Sauveur. Sans date.
Défilé des aliénés le jour de la fête du Bon-Sauveur. Sans date. -
Photographe inconnu . Archives Fondation Bon-Sauveur

Puis la kermesse, ses stands et le bal masqué. Que font-ils  ?

Va t-on assister à une partie de tennis sans balles et sans raquettes (film « Blow-Up »)  ?

Jour de kermesse l'hpital de Picauville. Sans date.
Jour de kermesse à l’hôpital de Picauville. Sans date. -
Photographe inconnu . Archives Fondation Bon-Sauveur
Jour de kermesse l'hpital de Picauville. Sans date.
Jour de kermesse à l’hôpital de Picauville. Sans date. - 
Archives Fondation Bon-Sauveur

Jacques Lebouteiller - Chanson sans voix qui tremble

 

Iconographie familiale

Ces interrogations se lèvent certes vite, notamment par les photos

des anciennes salles de soins réalisées par Mathieu Pernot. Néanmoins,

la conscience de parcourir l’histoire d’un établissement psychiatrique

est ralentie par la perception habituelle et historique de ce genre d’hôpital.

Mathieu Pernot  :  En photographie, la psychiatrie est le lieu d’un archétype.

Les photographes viennent en général de l’extérieur vers l’intérieur pour

vérifier ce que l’on pense dehors de dedans.

Ici, ces photos nous racontent autres choses. »

Philippe Artières et Mathieu Pernot (extrait de la préface du livre) :

«  Si quelques images pouvaient évoquer le San Clemente de Raymond Depardon,
les hystériques du docteur Charcot ou encore les “ monstres ” de Diane Arbus,
les instantanés de Picauville – repas, kermesse, vacances – renvoyaient
à une forme de normalité, celle de l’iconographie familiale.
Ils formaient un contrepoint inédit à la vision dramatisée de la “ folie ”,
dominante depuis le XIXe siècle. »
Jour de kermesse l'hpital de Picauville. Sans date.
Jour de kermesse à l’hôpital de Picauville. Sans date. -
Photographe inconnu .Archives Fondation Bon-Sauveur

On ne saura rien des pratiques thérapeutiques passées

du Bon-Sauveur. Les archives écrites, rapports, procès verbaux

d’internement, parties de dossiers médicaux reproduites

laissent deviner une relative légèreté de traitement.

Quelques diagnostics ou études de symptômes sur

des patients se révèlent aujourd’hui très étonnants.

Carte postale de la srie
Carte postale de la série « Bon-Sauveur de Picauville » (Manche).
Sans date. - Photographie Chardey. Archives Bon-Sauveur

Le fort violent traumatisme subi par les malades et le personnel fut la destruction

presque totale de l’hôpital par les bombardements alliés en juin 1944.

Situé sur la commune de Pont-L’Abbé, le bâtiment, malgré sa croix-rouge

peinte sur les toits, n’a pas été épargné. Dix-sept tués, vingt blessés dont six graves,

dix-neuf évasions. L’essentiel des archives sur un siècle brûlé.

«  L’asile des photographies  » est une complète, patiente et sensible restitution

de la mémoire de ce qu’on appelait un «  asile d’aliénés  ». Les textes retrouvés,

anecdotiques ou descriptifs d’une étape concrète de la prospection

d’Artières et de Pernot raccommodent les trous dans cette mémoire que

ne peut recouvrir la photographie. Notamment ceux laissés par les bombes.

louis_mespla louis_mespla 

Journaliste

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